vendredi 30 septembre 2011

Marcel DUCHAMP. « Changer de nom, simplement », entretien avec Guy VIAU, le 17 juillet 1960

Alfred STIEGLIZ, photographie de Fountain de Richard MUTT réalisée à la galerie 291 à New York au printemps 1917, peu après l'exposition de la Society of Independent Artists, en arrière-plan The Warriors de Marsden HARTLEY. Photographie publiée dans The Blind Man, numéro 2, May 1917, p.4
http://sdrc.lib.uiowa.edu/dada/blindman/2/index.htm



Changer De Nom, Simplement
Interview de Marcel Duchamp
à la Radio Télévision canadienne, le 17 juillet 1960.


GUY VIAU: Marcel Duchamp, quel pouvoir attribuez-vous à l'humour ?
MARCEL DUCHAMP: Un grand pouvoir : I'humour était une sorte de sauvetage pour ainsi dire, car jusque-là l'art était une chose tellement sérieuse, tellement pontificale que j'étais trés heureux quand j'ai découvert que je pouvais y introduire l'humour. Et ça a été vraiment une époque de découverte. La découverte de I'humour a été une libération. Et non pas l'humour dans le sens «humoriste» d'humour, «humor» humoristique d'humour. L'humour est une chose beaucoup plus profonde et plus sérieuse et plus difficile à définir. Il ne s'agit pas seulement de rire. Il y a un humour qui est I'humour noir, qui ne rit pas et qui ne pleure pas non plus. Qui est une chose en soi, qui est un nouveau sentiment pour ainsi dire, qui découle de toutes sortes de choses que nous ne pouvons pas analyser par les mots.
G.V.: Est-ce qu'il y a une grande part de révolte dans cet humour ?
MARCEL DUCHAMP: Une grande part de révolte, une grande part de dérision sur le mot sérieux, tout à fait sujet à caution, naturellement. Et c'est seulement par l'humour que vous pouvez en sortir, que vous vous libérez.
G.V.: Et en quoi l'humour est-il noir ?
MARCEL DUCHAMP: Noir, c'est une façon de parler, puisqu'il fallait donner une couleur. Évidemment il n'y avait pas de couleur plus explicative, parce que noir est le sombre, le sombre de cet humour en fait une chose presque méchante au lieu d'être aimable et dangereuse. C'est presque comme une sorte de dynamite, n'est-ce pas, de l'esprit. Et c'est pour ça qu'on l'a appelé noir. Noir n'a aucun sens, mais c'est un peu comme le drapeau noir de l'anarchie, si vous voulez, des choses comme ça. Le noir généralement a pris ce côté sombre et enterrement qu'on est obligé d'accepter, puis voilà tout.
G.V.: Vous avez dit quelque part que la réalité possible s'obtient en distendant un peu les lois physiques et chimiques. Qu'est-ce que vous voulez dire par là ?
MARCEL DUCHAMP: Par là, c'est simplement l'idée qu'il est facile de croire qu'en frottant une allumette on obtient du feu, enfin que la cause amène l'effet. Mais je trouve que les lois physiques telles qu'elles sont, telles qu'elles nous sont enseignées, ne sont pas forcément la vérité. Nous y croyons ou les expérimentons chaque jour, mais je crois qu'il est possible de considérer l'existence d'un univers où ces lois seraient étendues, changées un tout petit peu, exactement limitées. Et par conséquent on obtient immédiatement des résultats extraordinaires et différents et qui ne sont certainement pas loin de la vérité, parce que, Après tout, tous les cent ans ou tous les deux cents ans un nouveau physicien arrive qui change toutes les lois, n'est-ce pas? Après Newton, il y en a d'autres et même il y en aura d'autres après Einstein, n'est-ce pas, il faut s'attendre à ce changement des lois en question, donc.
G.V.: Mais toute votre activité, je pense, a tendu vers ce possible au-delà de l'immédiat ?
MARCEL DUCHAMP: Sûrement. En tout cas, sans être un scientifique moi-même, on peut avec l'espoir arriver à obtenir des résultats parallèles à l'influence, si vous voulez, dans l'art. Et qui donne des résultats satisfaisants en tout cas... satisfaisants, dans le sens du nouveau de la chose, qui apparaît comme une chose qui n'a jamais été vue avant. Du non-déjà-vu.
G.V.: Cela dit, Marcel Duchamp, vous n'en fûtes pas moins au début de votre carrière un impressionniste comme tout le monde.
MARCEL DUCHAMP: Oui, absolument comme tous les jeunes. Un homme jeune ne peut pas être un vieil homme, c'est impossible. Il faut passer par la filière des influences. On est obligé d'être influencé et on accepte cette influence très normalement. D'abord on ne s'en rend pas compte. La première chose à savoir: on ne se rend pas compte qu'on est influencé. On croit déjà être libéré et on est loin de l'être! Alors il faut l'accepter et attendre que la libération vienne d'elle-même, si elle doit jamais venir, parce que certaines gens ne l'obtiennent jamais, ne la voient jamais venir.
G.V.: Mais on a dit que vous aviez fait ces expériences impressionnistes un peu pour vous prouver que vous pouviez Ies faire...
MAPCEL DUCHAMP: Non, non...
G.V.: ... comme un tour de force.
MARCEL DUCHAMP: Non, je ne crois pas que ce soit exact. Si vous voulez, quand on peint comme un impressionniste à 17 ans ou à 16 ans, on est déjà tellement content de peindre, puisqu'on aime ça, qu'il n'y a pas d'analyse, de self-analyse qui explique pourquoi on fait ceci plutôt que cela et surtout on ne sait jamais ces choses-là que quarante ans après.
G.V.: Et qu'est-ce à ce moment-là que la Section d'Or ?
MARCEL DUCHAMP: La Section d'Or date déjà de 1912. Ça a été un petit salon qui eut lieu une année seulement, où se sont réunis tous les cubistes de cette époque-là, sauf Picasso et Braque, qui sont restés dans leur coin. Il y avait une sorte, déjà, de scission entre deux groupes de cubistes. Et alors là nous avons fait, grâce, avec Picabia, à mon frère Jacques Villon... toute une exposition de tableaux qui a eu beaucoup de succès, avec Apollinaire. Apollinaire, je crois, a fait une conférence pour présenter les jeunes peintres qui, à ce moment-là, étaient des iconoclastes, comme bien vous pensez.
G.V.: Et ce cubisme, est-ce qu'il ne se teintait pas, si je puis dire... d'un peu de futurisme ?
MARCEL DUCHAMP: Oui, il y avait une parenté en tout cas. L'époque était faite pour ça. Il y avait une chose un peu différente chez les futuristes, qui était la préoccupation de rendre un mouvement, de rendre le mouvement. D'essayer, si on rend le mouvement, de le rendre d'une façon impressionniste, c'est-à-dire naturaliste, de donner l'illusion du mouvement, ce qui était une erreur en soi, puisqu'on ne rend pas une chose, on ne rend pas le mouvement--d'une façon réaliste--par un tableau statique, n'est ce pas ? Ce n'est pas possible. D'où ça a échoué, parce que c'était la continuation de l'idée impressionniste attribuée au mouvement. Tandis que, par exemple, dans mon cas, où j'ai voulu faire la même chose avec le Nu descendant l'escalier, c'était un peu différent. Je me rendais très bien compte que je ne pouvais pas rendre l'illusion du mouvement dans un tableau statique. Je me suis donc contenté de faire un état de chose, un état de mouvement, si vous voulez, comme le cinéma le fait, mais sans le déroulement du cinéma comme le film le fait. À superposer l'une sur l'autre.
G.V.: Chacune de ses phases?
MARCEL DUCHAMP: Chacune de ses phases... indiquée d'une façon complètement graphique et non pas à intention de donner l'illusion du mouvement.
G.V.: Et c'est ce Nu descendant l'escalier qui a fait sensation à l'Armory Show en 1913.
MARCEL DUCHAMP: C'est cela.
G.V.: ... à New York.
MARCEL DUCHAMP: Et ça a eu une sorte de succés-scandale qui a été d'ailleurs tel, que beaucoup de gens ont connu le Nu descendant l'escalier soi-disant et ils n'ont jamais connu qui l'avait fait. Et ça ne les intéresse absolument pas de savoir qui était le peintre. Parce que le tableau les intéressait pour le tableau et c'était la seule chose qui les intéressait, de sorte que j'ai été complètement... comment dirais-je...
G.V.: ... ignoré.
MARCEL DUCHAMP:... ignoré du public, parce que le public connaissait mon œuvre sans savoir qui j'étais ou que j'existais.
G.V.: Est-ce que c'est à partir de ce moment-là que vous renoncez plus ou moins à la notion traditionnelle de tableau ?
MARCEL DUCHAMP: Oui, c'est vers 1913, vers 1912, et c'est en 1913 que j'ai commencé à douter même de mon cubisme. J'ai commencé à... j'étais probablement trés difficile à satisfaire à ce moment-là, je suppose... Et quand j'ai fait un an ou deux de ces choses-là, j'ai déjà pensé que c'était la fin, que ça ne menait pas trop loin, excepté que ça aurait pu faire beaucoup d'argent peut-être si j'avais continué. Mais alors, j'ai déjà changé d'idée en 1913, et je me suis trouvé engagé dans une autre forme d'expression où la peinture perd de sa priorité, si vous voulez. L'idée pour moi a été, à ce moment-là, de faire intervenir la matière grise en opposition à la rétine. Pour moi la rétine est une chose qui durait déjà depuis Courbet. Avec Courbet et après le Romantisme, toute la série des cent ans de peinture ou d'art plastique était basée sur l'impression rétinienne.
G.V.: Pour vous, depuis cent ans c'est donc que la peinture n'était pas uniquement rétinienne.
MARCEL DUCHAMP: Non, pas du tout, loin de là, au contraire. Tout ce qui représente la peinture religieuse, la peinture depuis la Renaissance, toute la Renaissance italienne, est entièrement matière grise, si j'ose employer ce terme quand je veux dire par là que l'idée était de glorifier une religion, la religion catholique, le Dieu catholique ou autre, enfin, mais le côté peinture lui-même, le côté rétinien du tableau était très secondaire... plus que secondaire... c'était I'idée qui importait à ce moment-là. Et c'est ce qui est arrivé, ce qui m'est arrivé à ce moment-là en 1912 ou 1913 avec l'idée de vouloir changer ou du moins me débarrasser de l'héritage rétinien des cent dernières années.
G.V.: Vous dites à ce moment-là: «Les tableaux ont de la poussière au derrière.»
MARCEL DUCHAMP: C'est ce qui m'a fait dire des choses comme ça parce qu'il fallait se débarrasser et obtenir une autre ouverture sur d'autres paysages pour ainsi dire.
G.V.: Est-ce à ce moment-là, Marcel Duchamp, qu'intervient Dada ?
MARCEL DUCHAMP: Non, c'est déjà plus loin. C'est déjà après. Je parle de 1912 et en 1912 quand j'ai déjà élaboré l'idée de la Mariée mise à nu par le céliba... par les célibataires, c'était encore sans teinte de dadaïsme. Il y avait évidemment en germe des choses semblables au dadaïsme, mais ça n'avait pas le caractère organisé d'un mouvement comme le dadaïsme l'a été en 1916, 1917 et 1918. Il y avait déjà des annonces d'un mouvement tel et même dans la Mariée mise à nu par ses célibataires, même il y a des détails ou des développements qui sont du domaine dadaïste. Mais c'était quand même une chose beaucoup plus large d'esprit qu'une chose tendancieuse comme le dadaïsme l'était... Après tout, le dadaïsme était une tendance à se débarrasser d'une façon violente des choses acceptées et admises. Mais là c'était encore une chose personnelle qui me concernait seulement, de faire un tableau ou une œuvre quelconque avec ma responsabilité seule et non pas un manifeste d'ordre général. Après, vers 1916, 1917 en effet, le dadaïsme est intervenu et j'y ai collaboré, parce que ça entrait tout à fait dans mes vues.
G.V.: Alors si vous voulez nous reviendrons au dadaïsme tout à l'heure. J'aimerais bien que vous nous parliez davantage de la Mariée mise à nu par ses Célibataires, même. Quelle est la clef de ce tableau? J'ai cru lire d'André Breton qu'il y avait un fil d'Ariane au tableau.
MARCEL DUCHAMP: Il n'y a pas un fil d'Ariane, il y a le fait que dès l'abord le tableau n'est pas conçu comme une toile sur laquelle vous mettez de la peinture. Le tableau est comme un morceau de verre. D'abord, il est peint sur verre, sur lequel est en effet peint: de la peinture à l'huile est peinte, mais les formes qui y sont sont d'abord vues avec l'idée de transparence. L'idée de toile disparaît. Pour déjà me satisfaire, me satisfaire dans l'idée que le tableau n'est pas un tableau, c'est-à-dire un châssis avec de la toile dessus et des clous autour. J'ai voulu me débarrasser de ça, qui est une impression physique. Après cela, chaque partie du tableau, de ce verre, avait été préparée minutieusement avec des idées et non pas avec des coups de crayon. Des idées inscrites sur des petits papiers au fur et à mesure qu'elles venaient. Et finalement quelques années après j'ai réuni toutes ces idées dans une boîte qui s'appelle la Boîte verte, et qui sont des petits papiers... découpés ou déchirés, plutôt, que j'ai fait déchirer pour en faire une édition de 300 exemplaires et qui sont dans la même forme que les papiers déchirés originaux et dans lesquels presque toutes les idées qui sont dans ce grand verre sont écrites, ou indiquées, en tout cas.
G.V.: Quels sont les principaux protagonistes de Dada à ce moment-là ?
MARCEL DUCHAMP: Les premières manifestations de Dada eurent lieu à Zürich en 1916, avec Tzara et Arp et Huelsenbeck et c'est à peu près tout. Et ça a duré deux ou trois ans. Après ça, Tzara est venu à Paris, où il a fait la connaissance de Breton, Aragon... plusieurs autres qui sont devenus les Dada de Paris. La différence est que, à Zürich, il n'y a pas eu vraiment de grande manifestation publique, c'est-à-dire il y avait un Cabaret Voltaire avec des manifestations, mais plus ou moins privées, de cabaret. A Paris, ça a pris une ampleur plus grande et Breton et Aragon ont fait des manifestations dans des salles comme la salle Gaveau, où vraiment le public est venu et en masse avec l'idée de chahuter, pour ainsi dire, trés copieusement. Et d'ailleurs, c'est ce qui a fait toute l'histoire de Dada. Pendant trois ans il y a eu des manifestations différentes dans chacune des grandes salles de Paris, et ça ne s'est terminé que vers 1920, 1922 ou 1923, quand vraiment il y a eu des dissensions internes entre les différents dadaïstes, qui n'étaient plus contents. Chacun voulant être le grand protagoniste, naturellement il y a eu des fâcheries. Ils se sont fâchés et Breton a décidé de commencer une autre chose qui s'appelait le Surréalisme. D'ailleurs le nom «Surréalisme» avait été donné par Apollinauire sans le savoir à une pièce qui s'appelle les Mamelles de Tirésias, donnée pendant la guerre à Paris dans un petit théâtre et ça s'appelait, je crois, Drame surréaliste. Mais en tout cas le mot «Surréalisme» a été... fabriqué par Apollinaire et il ne savait pas que ça allait prendre tellement d'importance, j'en suis sûr, quand il y a pensé.
G.V. : Et votre amitié avec Picabia remonte à ce moment-là ?
MARCEL DUCHAMP: Oh oui! Picabia naturellement était un des grands, a été pour ainsi dire le go-between, il est différent parce qu'il était à New York et nous avons déjà connu Dada en 1916 à New York quand il était ici et ensuite il a quitté New York en 17-18, il est allé à Barcelone. De là, il est allé en Suisse. Il est allé en Suisse où il a fait la connaissance de Tzara. Tzara et lui sont revenus à Paris, se sont liés d'amitié avec Breton et vraiment le mouvement a commencé là. D'ailleurs, c'est ce qui n'a pas été approuvé par les Dada allemands, qui, eux, voulaient en faire une chose complètement politique et d'ordre politique seulement, dans le sens communiste du mot.
G.V. : Vous parliez de manifestations Dada. C'était quoi, ces manifestations là ? C'étaient des manifestes, ou quoi?
MARCEL DUCHAMP: Non. C'étaient des manifestations théâtrales. Ah non! C'était sur la scène, par exemple dans la salle Gaveau qui n'est pas une scène, mais enfin c'est tout de même la scène où l'orchestre s'assoit pour jouer les concerts. Il y avait des pièces de théâtre fabriquées pour l'occasion par Breton, par Ribemont-Dessaignes, par des gens comme ça, qui étaient jouées avec des décors appropriés, c'est-à-dire des bonnets de coton, des entonnoirs, tout ce qu'il y avait comme fantaisie... imaginative.
G.V.: Marcel Ducharnp, qu'est-ce qu'un ready-made ?
MARCEL DUCHAMP: Un ready-made (rire), c'est d'abord le mot inventé que j'ai pris pour désigner une œuvre d'art qui n'en est pas une. Autrement dit, qui n'est pas une œuvre faite à la main. Faite par la main de l'artiste. C'est une œuvre d'art qui devient œuvre d'art par le fait que je la déclare ou que l'artiste la déclare œuvre d'art, sans qu'il y ait aucune participation de la main de l'artiste en question pour la faire. Autrement dit, c'est un objet tout fait, l’on trouve, et généralement un objet de métal... plus qu'un tableau en général.
G.V.: Voulez-vous donner un exemple d'un ready-made à l'état pur ?
MARCEL DUCHAMP: Alors dans le «ready-made aidé», c'est justement un objet dans le même genre auquel l'artiste ajoute quelque chose comme la moustache à la Joconde, qui est une chose ajoutée et qui donne un caractère spécial (rire) à la Joconde, on va dire.
G.V.: Est-ce que vous avez pensé à ajouter un titre à ce tableau ?
MARCEL DUCHAMP: Mais ça, je n'ose pas vous en donner la traduction, même en anglais.
(rires)
G.V.: Et qu'est-ce qu'un «ready-made réciproque», maintenant?
MARCEL DUCHAMP: Un «ready-made réciproque»... ça a été le cas de... ça n'a pas été fait, mais ça aurait pu être fait. C'est de prendre un Rembrandt et de s'en servir comme planche à repasser, n'est-ce pas, c'est réciproque par le fait que le tableau devient le ready-made d'un vrai tableau fait par Rembrandt, qui devient un ready-made pour en repasser les chemises, comprenez-vous ?
(rires)
G.V.: Je pense que vous avez toujours été... un esprit intransigeant, votre œuvre a été rare, cet acte rare, mais vous l'avez réunie dans une espèce de musée portatif...
MARCEL DUCHAMP: Oui, j'avais fait une grande boîte, la Boîte en valise, c'est-à-dire une boîte qui était en carton plus ou moins avec toutes les reproductions des choses que j'avais faites, à peu près, tout ce que j'ai pu retrouver en tout cas, et ça ne représente d'ailleurs que 90 ou 95... articles et j'en avais fait faire une reproduction et j'ai... en couleur, en noir et il y a même trois petits ready-made qui sont en dimension réduite de l'original, qui sont la machine à écrire, l'ampoule d'air de Paris que j'avais apportée à mon ami Arensberg comme souvenir. J'avais fait remplir une ampoule, d'air de Paris, c'est-à-dire j'avais simplement fait ouvrir une ampoule et laissé l'air entrer tout seul et fermé l'ampoule et rapporté à New York comme cadeau d'amitié, en tout cas. Et il y a aussi des jeux de mots.
G.V.: Je pense que c'est là une de vos spécialités.
MARCEL DUCHAMP: Oui, je ne sais pas si vous vous les rappelez... je ne me les rappelle pas toujours par cœur, mais enfin je vais vous en lire un ou deux:
«Avez-vous déjà mis la moelle de l'épée dans le poil de l'aimée ?»
II faut lire très lentement, parce que c'est comme des jeux de mots, il faut...
G.V.: (rire)
MARCEL DUCHAMP: «Nous estimons les ecchymoses des esquimaux aux mots exquis.»
Ça faisait partie des choses qui tournent avec un moteur. Et un autre encore:
«Inceste ou passion de famille à coups trop tires.»
G.V.: (rire)
MARCEL DUCHAMP: Et ensuite:
«Moustiques domestiques demi-stock pour la cure d'azote sur la Côte d'Azur.»
G.V.: (rire)
MARCEL DUCHAMP: Il y en a encore un autre:
«Le système métrite par un temps blenorrhagieux.»
G.V.: (rire)
MARCEL DUCHAMP: Qu'est-ce qu'il y a encore ?
«Parmi nos articles de quincaillerie paresseuse, Rrose Sélavy et moi recommandons le robinet qui s'arrête de couler quand on ne l'écoute pas.»
G.V.: Quelle gentillesse! Et, dites, ce nom de Rrose Sélavy revient souvent dans vos œuvres. Qu'est-ce que ça veut dire, Rrose Sélavy ?
MARCEL DUCHAMP: En 1920, j'ai décidé que ça ne me suffisait pas d'être un seul individu avec un nom masculin, j'ai voulu changer mon nom pour changer, pour les ready-made surtout, pour faire une autre personnalité de moi-même, comprenez-vous, changer de nom, simplement. Et c'est un...
G.V.: Vous parlez de la négation du dadaïsme. Quelle a été l'affirmation surréaliste ? Qu'cst-ce que ça a été...
MARCEL DUCHAMP: Il y a eu beaucoup de points d'affirmation. Un des points importants, c'est l'importance du rêve. L'importance des poèmes oniriques et le côté freudien aussi, le côté interprétation self-analytique. Quoiqu'ils ne se soient pas complètement sentis élèves de Freud ou disciples de Freud du tout, mais ils se sont servis de Freud. Ils se sont servis de Freud comme un élément pour analyser leur subconscient, en tout cas.
G.V.: Et toutes ces œuvres surréalistes dont on a parlé tout à l'heure, est-ce qu'elles avaient, à ce moment-là, une valeur de préfiguration de...
MARCEL DUCHAMP: Oui, je crois. Toute œuvre écrite est empreinte d'un peu de surréalisme et toutes les œuvres, même une œuvre visuelle peinte. On sent que le peintre qui l'a faite a vu le surréalisme avant, même s'il l'a refusé, comprenez-vous.
G.V.: On a l'impression que le surréalisme a donné une nouvelle orientation tout à fait... trés nette à l'imagination de l'homme contemporain.
MARCEL DUCHAMP: Très nette, et je dis... c'est une scission absolue et comme toujours donnée par la littérature et par la peinture ou par les arts, cette scission aura des répercussions dans le monde actuel politique ou autre ou interplanétaire, presque.
G.V.: Le fait est que votre activité à vous, Marcel Duchamp, se soit déroulée aux États-Unis... est-ce que ça lui donnait cette activité, une urgence particulière, soit par contraste ou par...
MARCEL DUCHAMP: Non, le contraste a été pour moi personnel. La vie aux États-Unis a été beaucoup plus simple qu'en France, ou qu'en Europe. Parce que... il y a un respect de l'individu ici qu'il n'y a pas en Europe. L'individu n'est pas respecté en Europe. On force l'individu à entrer dans une catégorie, soit politique, soit de camarades, soit d'école, soit des choses. Ici vous êtes complètement seul si vous voulez l'être. Et il y a un respect de l'individu qui est remarquable, à mon avis.
G.V.: Et vous croyez que cette généreuse liberté... n'est pas compromise ici, qu'elle est sans danger pour l'instant?
MARCEL DUCHAMP: Beaucoup moins qu'ailleurs, en tout cas. Chez nous, un homme libre, ici, est un homme presque libre, tandis qu'en Europe il n'y a pas d'homme libre.
G.V.: Et vous croyez qu'il peut, qu'il pourre le demeurer longtemps, presque libre ?
MARCEL DUCHAMP: Probablement. On y reviendra, à l'homme libre, parce que... on ne pourra pas, on ne peut pas devenir des fourmis pour le plaisir de devenir des fourmis.

http://www.toutfait.com/issues/volume2/issue_4/interviews/md_guy/md_guy_f.html

lundi 26 septembre 2011

Raoul HAUSMANN. The German Philistine Gets Upset

Raoul HAUSMANN, Message à I. K. BONSET (Theo van DOESBURG), 1921, cinglantes remarques écrites sur un portrait photographique de Herwarth WALDEN, principal promoteur de l'« expressionnisme » artistique, propriétaire de la galerie Der Sturm et animateur de la revue Der Sturm - pour HAUSMANN et les dadas de Berlin, l'un des représentants les plus insignes du philistinisme moderniste allemand






Why? Who is the German philistine that he should be upset by dadaism? It is the German writer, the German intellectual who explodes with rage because his formally perfect schmalz-bread soul has been left to bake in the sun of ridicule, who fumes because he has suffered a direct hit to the brain, which in his case is located where he sits—and now he has nothing to sit on! No, do not attack us, gentlemen, we are already our own enemies and know better than you where we are vulnerable. Understand at last that your positions are a matter of utter indifference to us, that we have other things to worry about. Use your energies to beat only the drum of your own intellectual business, pound about fiercely only on your own bellies, until a god takes pity on the sound—we have long since cast this old drum aside. We play, squeak, curse, laugh our irony:

Dada! For we are—anti-dadaists!

There you have~lt! Spare yourselves your fingers worked to the bone and stitch up your ~3 torn traps. You have done it all for nothing! That you could not put us up against the wall, we take solemn note of that. It makes us want to wash out your intestines and present you with the balance of your solemn values.

After an enormous thinning of vital feeling in aesthetic abstractions and moral-ethical farces, there rises from the European soup the expressionism of the German patriot, who took a respectable movement started by the French, Russians, and Italians and fabricated a small, profitable war industry in an endlessly plump enthusiasm. The hurdy-gurdy of pure literature, painting, and music is being played in Germany on an extremely fit business footing. But this pseudotheosophic, Germanic coffee klatsch, which got as far as achieving recognition among East Prussian Junkers, should be a matter of indifference to us here, just like the businessman's machinations of Mr. [Herwarth] Walden, a typical German philistine who believes it necessary to wrap his transactions in a Buddhistic-bombastic little cloak. To the honor of his business genius, but send his aesthetic and his artistic Prussianism back to where they came from, the office of the shady lawyer. Were Walden and his writers' school revolutionary in the slightest, they would first have to comprehend that art cannot be the aesthetic harmonization of bourgeois notions of property.

Oh my gentlemen philistines, you say that art is in danger? Yes, do you not know then that art is a beautiful female form without clothes, that she counts on being taken to bed, or that she instigates the action herself? No, gentlemen, art is not in danger—art no longer exists! It is dead. It was the development of all things, it wrapped even the tuberous nose— and piggish lips of Sebastian Muller with beauty. It was a beautiful appearance, departing from a sunny cheerful feeling for life—and now nothing elevates us any longer, nothing! /483/ Give up sexual romanticism, my gentlemen writers—we are no longer in the mood; better you should show your beautifully tatooed bellies, spit words, splash some geometry in colors and call it abstract art—that is just as acceptable to us as your tightrope walk all around expressionism! The absolute incapacity to say something, to grasp a thing, to play with it—that is expressionism, an intellectual Preißnitz compress for decayed entrails, some jello putrid from the start and the cause of a solemn stomachache. The writing or painting philistine appears to himself properly sacred in the process; he finally expands somehow beyond himself into an indefinite, general blah-blah—oh expressionism, you universal turn in the romantic capacity for lies! But it is only the Activists that made the farce unbearable, who wanted to bring the spirit and the art that they perceived in expressionism to the people. These feeble minds, who somehow once read Tolstoy and of course did not understand him, are now dripping with an ethic one can approach only with a dung fork. These fools, who are incapable of engaging in politics, have invented this etheristic Activist marmalade to expand the market for itself, in this case among the proletariat. But the proletarian, if you will forgive me, is not nearly so stupid as not to recognize a fruitless tempest in a teapot. Art to him is something that comes from the bourgeoisie. And we are anti-dadaists to such an extent that when some fellow among us wants to exhibit something beautiful or aesthetic—a securely bounded good little feeling—we will knock his well-smeared sandwich out of his hand into the garbage. For us the world today has no deep meaning but that of the most unfathomable nonsense; we want nothing to do with spirit or art. Science is silly—quite likely the sun today still revolves around the earth. We advance no ethics, which always remain ideal (a swindle)— but that is why we do not want to tolerate the bourgeoisie, who hang their moneybag over the existential possibility of man like Geßler does his hat. We wish to organize the economy and sexuality rationally, and we do not give a hoot for culture, which was no tangible affair. We wish an end to it and with it an end to the philistine writer, the manufacturer of ideals that were nothing but its excrement. We wish the world moved and movable, disorderly instead of orderly—away with all the chairs, away with feelings and noble gestures! And we are anti-dadaists because for us the dadaist still possesses too much feeling and aesthetics. We have the right to every amusement, whether in words, in forms, colors, noises; all of this, however, is splendid idiocy, which we consciously love and manufacture—an enormous irony like life itself: the precise technique of nonsense definitively conceived as the meaning of the world!

Down with the German philistine!

Raoul HAUSMANN, "The German Philistine Gets Upset", publié pour la première fois sous le titre "Der deutsche Spießer ärgert sich," Der Dada, no. 2 (1919), p.2.

Traduction anglaise in Anton KAESK, Martin JAY et Edward DIMENDBERG. The Weimar Republic Sourcebook. University of California Press, 1994.




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Theo VAN DOESBURG







Prestation masquée de Theo VAN DOESBURG lors de Kleine Soirée DADA-MERZ, 1923















Tate Modern’s superb exhibition, Van Doesburg and the International Avant-Garde is the first major UK show to be devoted to the Dutch painter, architect and writer. This vast survey casts the spotlight on an artist frequently overshadowed by his co-founder of the De Stijl movement, Piet Mondrian. Theo van Doesburg made a distinctive contribution to the avant-garde in his plastic expression of the fourth dimension – time. Whereas Mondrian aspired towards total stability in his Neo-Plastic paintings, van Doesburg strove for dynamism in his use of the diagonal. He built bridges across the disciplines of painting, architecture, design, poetry and typography while re-inventing himself in multiple roles through a continual process of “becoming”. Not only was he the editor of the little magazine De Stijl, but also a Dada personality, a Bauhaus teacher and a proponent of Art Concret. Above all, he was a brilliant facilitator, as seen in the swirling mass of connections that unfolds in this kaleidoscopic exhibition.

The latest instalment in a Tate Modern series charting aspects of early Modernism via artistic exchange, the show results from a timely collaboration with the Stedelijk Museum De Lakenhal in Leiden, where van Doesburg began his career. In the first gallery, a mystical spiritualism shines out of the darkness in the pupil-like Cosmic Sun (1915), an ode to Kandinsky. Soon circles fall apart, dissecting the picture plane in homage to the father of cubism, Cézanne. The geometrical assemblage that floats across the canvas in Composition I (Still Life) (1916) marks a turning point in van Doesburg’s path towards abstraction. The next year he would transfigure a cow into an arrangement of blocks. His affiliation with Mondrian sparked his rapid progress: together with Bart van der Leck, Vilmos Huszár, Georges Vantongerloo and others, they launched De Stijl in 1917. The group’s journal would become a platform for constructing a modernist network across Europe, in quest of a Gesamtkunstwerk (total artwork) – it published a manifesto calling for progressive artists to “work for the formation of an international unity in Life, Art and Culture”.1 With the signing of the Armistice on 11 November 1918, they signalled the dawn of a new consciousness through a universal means of expression. The movement advocated the use of an elemental vocabulary of the straight line, the square and the rectangle in architecture, industrial design and urban planning, in order to effect societal change.

Van Doesburg made a key contribution to the development of De Stijl’s Neo-plasticist language through the method of abstraction he applied to his stained-glass windows. First he derived a motif from nature and then he broke up the image into multiple parts before re-integrating them into a whole design through patterns of repetition, reflection and rotation. The results appear in Stained-Glass Composition IV for the De Lange House, Alkmaar (1917) – a tripartite window coloured with a mosaic pattern, drawn from the study of a seated woman, calling to mind Bach’s fugues. The compositional method would open up a lively relationship with the environment, transforming van Doesburg’s outlook on architecture. Fascinated by motion, he assembled floating planes in space to express the fourth dimension of time. This creative approach emerges in the maze-like design for the tiled floor of De Vonk holiday home in Noordwijkerhout (c1917–18), a collaborative project with J.J.P. Oud. The chaotic dynamism of the pavement forces back the appearance of the interior walls, as though to “neutralise gravity”,2 in the architect’s own words. He theorised the art of building in the Principles of Neo-Plastic Art (1919), identifying an active element, mass, and a passive one, space. In a revised edition for the Bauhaus, where he propagated the “New Spirit” in 1921–22, he qualified “the elementary means of expression of architecture”, in terms of the positive elements of line, plane, volume, space and time, and negative elements: void and material.3 However, it was not only in architecture that he engaged with the concept of movement: he ran with the idea in his painting, graphic design, poetry and film.

Before leaving for Germany in 1920 van Doesburg produced a revolutionary expression of space-time, Composition XVIII in Three Parts. The artist intended for the pyramidal arrangement of paintings to compose a single whole, but its externalised centre met with Mondrian’s criticism. Yet the innovation succeeds in drawing the eye to the passage of a white cube, as it moves across the trio of canvases. Van Doesburg’s graphic design reflects this displacement: a layout of overlapping words enables a simultaneous reading of the poster for the international Cubist artists’ group show La Section d’Or (1920), where he exhibited Composition XVIII. Meanwhile, the cover design for the text of his lecture Classic, Baroque, Modern (1920) features a diagonal alignment of “Baroque”, which contravenes the static orthogonal grid associated with Neo-plasticism. As sole editor of the magazine De Stijl, van Doesburg engaged in a dialogue with Constructivist artists from abroad to communicate his dynamic vision of typography. For a special issue entitled Of 2 Squares (1922), based on the Suprematist children’s storybook charting the relationship between the fourth dimension, time, the three dimensions of the book and the two dimensions of the page, the Russian artist El Lissitzky produced a cover of soaring letters and shapes. This evoked a playful sense of freedom and a desire for flight, qualities that inspired van Doesburg to explore Futurism and Dadaism.

As editor of De Stijl, he published the seminal Call for Elementary Art, urging the artist to be “the interpreter of energies that shape the world’s elements”.4 In a bold move, he assumed the name of an experimental artist, I.K. Bonset, displaying a skill for deconstruction in the final statement of his first text: “SPACE/AM I”.5 The words mark a “splintering” of the self – a process that allowed him to escape traditional values and embrace the anarchic non-sense of Dada. In this vein, he published sound poems, set up a Dada convention at Weimar in 1922 and initiated a Dada tour in the Low Countries the next year. He improvised a Dada-Constructivist review Mécano, with whimsical texts and images scattered across primary-coloured paper, a counterpoint to the clean-cut austerity of De Stijl. The yellow issue featured paintings by Man Ray, articles by Tristan Tzara and poetry by Kurt Schwitters – who created an animated form of Dada, “Merz”. The blue issue was a showcase for the Hungarian artist László Moholy-Nagy, who wrote of his fascination at discovering the real identity of I.K. Bonset in Weimar. True to form, van Doesburg staged a surprising rapprochement between the Dadaists and Constructivists. “Life is an extraordinary invention,”6 he said.

Van Doesburg inspired cross-disciplinary practice in the Zurich Dadaist circle, which altered the direction of Neo-plasticism. The fusion of scroll paintings modelled on the Japanese makimono format and the syntax of music was a catalyst for experimentation. Viking Eggeling's Diagonal Symphony (1920) and Hans Richter’s Rhythmus 23 (1923) reveal sequences of colours that hold the potential to create the kinetic movement of film. But van Doesburg’s abstract language would soon take a new turn. From 1924 to 1927, he adopted a fresh approach, resulting from his theory of Elementarism, his rediscovery of axonometric projections and his oblique compositions for the University Hall in Amsterdam. The diagonal grid now underpinned his aesthetic, signifying a spatio-temporal tension in the monochromatic Counter-Composition VI (1925). When coloured by dissonant tones, his grids resonate with chords of energy, as in his mural scheme for the Café Aubette’s cinema-dance hall in Strasbourg (1926–27), devised in collaboration with Dadaists Sophie Taeuber and Hans Arp. Nearby in the gallery is the wooden furniture of Gerrit Rietveld, whose eloquence inspired van Doesburg to make the “unenclosed spatial relationship” the rule of “architecture as the synthesis of Neo-plasticism”.7 Rietveld’s Red-blue chair (1923) is among the iconic objects that populate the exhibition, weaving a rich context for understanding De Stijl’s human-made order.

Later, when living in Paris, van Doesburg created freeze-frame imagery: he achieved the illusion of a continuous state of motion by curtailing shapes at the canvas edge of Simultaneous Counter-Composition (1930). He re-evaluated his aesthetic in The Basis of Concrete Art, hinting at the manifesto’s radical nature with his suggestion of infinity in Arithmetic Composition (1929–30). Yet after his untimely death in 1931, he was remembered for his ability to gather the art world in a moment, under the diagonal sign. De Stijl contributors published a memorial issue with van Doesburg’s name emblazoned diagonally across the cover, rising in an upward trajectory. It is telling that a month before he died he wrote of a desire for rest and a hope to create the “style of the whole man”.8 For to recognise van Doesburg’s legacy is not only to appreciate his universal approach; it is to glimpse his singularity, as an artist who amused with his Dadaist act, and as an architect of lightness, who designed floating planes of time. With more than 400 objects and an illustrated catalogue featuring essays on multiple aspects of his life, this Tate Modern exhibition is the place to encounter new dimensions of Modernism.

References

1. Van Doesburg & the International Avant-Garde: Constructing a New World, edited by Gladys Fabre and Doris Wintgens Hötte, Tate Publishing, London, 2009: 11.

2. Ibid: 47.

3. Ibid: 37.

4. Ibid: 29.

5. Ibid: 70.

6. Ibid: 34.

7. Ibid: 43.

8. Ibid: 66.

Nicola HOMER. « Van Doesburg and the International Avant-Garde : Constructing a New World » (Tate Modern, London, 4 February–16 May 2010)
http://www.studio-international.co.uk/reports/van-doesburg-2010.asp
http://designhistorymashup.blogspot.com/2008/04/theo-van-doesburg.html

vendredi 23 septembre 2011

Fesival DADA Paris


FESTIVAL DADA PARIS 1920-23
(LTMCD 2513) £10

Un CD inédit émanant du répertoire pour piano executé pendant deux événements historiques à Paris, le Festival Dada du 26 mai 1920, et la funeste Soirée du Coeur à Barbe du 6 juillet 1923, spectacle interrompu par la confrontation violente entre le groupe dada de Tristan Tzara et la bande des surréalistes d'André Breton.

La musique de cet événement de 1920 comprend deux morceaux par Georges Ribemont-Dessaignes et La Nourrice américaine de Francis Picabia, décrite comme "trois notes répétées jusqu'à l'infinité". Parmi les autres sélections de cette soirée turbulente se trouvent deux fox-trots de Georges Auric et Darius Milhaud (membres du célèbre Groupe des Six), Trois Morceaux en forme de poire d'Erik Satie et Trois pièces faciles d'Igor Stravinsky. Le CD comprend aussi la piècette Le Piège de Méduse de Satie, Drie composities voor Klavier du dadaîste/surréaliste belge E.L.T. Mesens, et une interprétation pour piano de l'Erratum musical de Marcel Duchamp (1913).

Pour terminer, le CD présente un enregistrement historique (1925) de Stravinsky par Marcelle Meyer, pianiste renommée qui a participé à la soirée de 1923. Ce CD contient les tout premiers enregistrements des compositions de Ribemont-Dessaignes, Picabia and Mesens, raretés musicales dadaîstes. Le pianiste virtuose hollandais Peter Beijersbergen van Henegouwen joue la musique (qu'il a su dénicher). James Hayward a écrit la brochure contenant des notes détaillées sur la période. Pour lire cette brochure en ligne cliquez ici.

Sommaire :

Erik SATIE : Trois morceaux en forme de poire
Darius MILHAUD : Caramel Mou (shimmy)
Georges AURIC : Adieu, New York (fox-trot)
Igor STRAVINSKY : Trois pièces faciles à quatre mains
Georges RIBEMONT DESSAIGNES : Le Nombril interlope
Francis PICABIA : La nourrice américaine (rapide)
Georges RIBEMONT DESSAIGNE : Pas de la chicorée frisée
Erik SATIE : Le Piège de la Méduse
E.L.T. MESENS : Drie composities voor Klavier
Marcel DUCHAMP : Erratum musical
Francis PICABIA : La nourrice américaine (lent)
Igor STRAVINSKY : Rag-Time (1925 recording by Marcelle MEYER)
Le Pelican (fox-trot) (enregistrement sur cire)
ISBN 978-1-906310-07-3
Si vous désirez commander les CD suivants au prix de £10 chacun contactez : James NICE
jnice@ltmpub.freeserve.co.uk

http://www.dadart.com/dadaisme/dada/016-dada-cd.html


samedi 17 septembre 2011

NELLY VAN DOESBURG




Florence HENRI. Portrait photographique de Nelly van Doesburg, 1928



GÉNÉRALITÉS



In the years before World War I, Europe appeared to be losing its hold on reality. Einstein’s universe seemed like science fiction, Freud’s theories put reason in the grip of the unconscious and Marx’s Communism aimed to turn society upside down, with the proletariat on top. The arts were also coming unglued. Schoenberg’s music was atonal, Mallarmé’s poems scrambled syntax and scattered words across the page and Picasso’s Cubism made a hash of human anatomy.
And even more radical ideas were afoot. Anarchists and nihilists inhabited the political fringe, and a new breed of artist was starting to attack the very concept of art itself. In Paris, after trying his hand at Impressionism and Cubism, Marcel Duchamp rejected all painting because it was made for the eye, not the mind.
“In 1913 I had the happy idea to fasten a bicycle wheel to a kitchen stool and watch it turn,” he later wrote, describing the construction he called Bicycle Wheel, a precursor of both kinetic and conceptual art. In 1916, German writer Hugo Ball, who had taken refuge from the war in neutral Switzerland, reflected on the state of contemporary art: “The image of the human form is gradually disappearing from the painting of these times and all objects appear only in fragments....The next step is for poetry to decide to do away with language.”
That same year, Ball recited just such a poem on the stage of the Cabaret Voltaire in Zurich, a nightspot (named for the 18th-century French philosopher and satirist) that he, Emmy Hennings (a singer and poet he would later marry) and a few expatriate pals had opened as a gathering place for artists and writers. The poem began: “gadji beri bimba / glandridi lauli lonni cadori....” It was utter nonsense, of course, aimed at a public that seemed all too complacent about a senseless war. Politicians of all stripes had proclaimed the war a noble cause—whether it was to defend Germany’s high culture, France’s Enlightenment or Britain’s empire. Ball wanted to shock anyone, he wrote, who regarded “all this civilized carnage as a triumph of European intelligence.” One Cabaret Voltaire performer, Romanian artist Tristan Tzara, described its nightly shows as “explosions of elective imbecility.”
This new, irrational art movement would be named Dada. It got its name, according to Richard Huelsenbeck, a German artist living in Zurich, when he and Ball came upon the word in a French-German dictionary. To Ball, it fit. “Dada is ‘yes, yes’ in Rumanian, ‘rocking horse’ and ‘hobby horse’ in French,” he noted in his diary. “For Germans it is a sign of foolish naiveté, joy in procreation, and preoccupation with the baby carriage.” Tzara, who later claimed that he had coined the term, quickly used it on posters, put out the first Dada journal and wrote one of the first of many Dada manifestoes, few of which, appropriately enough, made much sense.
But the absurdist outlook spread like a pandemic—Tzara called Dada “a virgin microbe”—and there were outbreaks from Berlin to Paris, New York and even Tokyo. And for all its zaniness, the movement would prove to be one of the most influential in modern art, foreshadowing abstract and conceptual art, performance art, op, pop and installation art. But Dada would die out in less than a decade and has not had the kind of major museum retrospective it deserves, until now.
The Dada exhibition at the National Gallery of Art in Washington, D.C. (on view through May 14) presents some 400 paintings, sculptures, photographs, collages, prints, and film and sound recordings by more than 40 artists. The show, which moves to New York’s Museum of Modern Art (June 18 through September 11), is a variation on an even larger exhibition that opened at the Pompidou Center in Paris in the fall of 2005. In an effort to make Dada easier to understand, the American curators, Leah Dickerman, of the National Gallery, and Anne Umland, of MoMA, have organized it around the cities where the movement flourished—Zurich, Berlin, Hanover, Cologne, New York and Paris.
Dickerman traces Dada’s origins to the Great War (1914-18), which left 10 million dead and some 20 million wounded. “For many intellectuals,” she writes in the National Gallery catalog, “World War I produced a collapse of confidence in the rhetoric—if not the principles—of the culture of rationality that had prevailed in Europe since the Enlightenment.” She goes on to quote Freud, who wrote that no event “confused so many of the clearest intelligences, or so thoroughly debased what is highest.” Dada embraced and parodied that confusion. “Dada wished to replace the logical nonsense of the men of today with an illogical nonsense,” wrote Gabrielle Buffet-Picabia, whose artist husband, Francis Picabia, once tacked a stuffed monkey to a board and called it a portrait of Cézanne.
“Total pandemonium,” wrote Hans Arp, a young Alsatian sculptor in Zurich, of the goings-on at the “gaudy, motley, overcrowded” Cabaret Voltaire. “Tzara is wiggling his behind like the belly of an Oriental dancer. Janco is playing an invisible violin and bowing and scraping. Madame Hennings, with a Madonna face, is doing the splits. Huelsenbeck is banging away nonstop on the great drum, with Ball accompanying him on the piano, pale as a chalky ghost.”
These antics struck the Dada crowd as no more absurd than the war itself. A swift German offensive in April 1917 left 120,000 French dead just 150 miles from Paris, and one village witnessed a band of French infantrymen (sent as reinforcements) baa-ing like lambs led to slaughter, in futile protest, as they were marched to the front. “Without World War I there is no Dada,” says Laurent Le Bon, the curator of the Pompidou Center’s show. “But there’s a French saying, ‘Dada explains the war more than the war explains Dada.’”
Two of Germany’s military leaders had dubbed the war “Materialschlacht,” or “the battle of equipment.” But the dadas, as they called themselves, begged to differ. “The war is based on a crass error,” Hugo Ball wrote in his diary on June 26, 1915. “Men have been mistaken for machines.”
It was not only the war but the impact of modern media and the emerging industrial age of science and technology that provoked the Dada artists. As Arp once complained, “Today’s representative of man is only a tiny button on a giant senseless machine.” The dadas mocked that dehumanization with elaborate pseudodiagrams—chockablock with gears, pulleys, dials, wheels, levers, pistons and clockworks—that explained nothing. The typographer’s symbol of a pointing hand appeared frequently in Dada art and became an emblem for the movement—making a pointless gesture. Arp created abstract compositions from cutout paper shapes, which he dropped randomly onto a background and glued down where they fell. He argued for this kind of chance abstraction as a way to rid art of any subjectivity. Duchamp found a different way to make his art impersonal—drawing like a mechanical engineer rather than an artist. He preferred mechanical drawing, he said, because “it’s outside all pictorial convention.”
When Dadaists did choose to represent the human form, it was often mutilated or made to look manufactured or mechanical. The multitude of severely crippled veterans and the growth of a prosthetics industry, says curator Leah Dickerman, “struck contemporaries as creating a race of half-mechanical men.” Berlin artist Raoul Hausmann fabricated a Dada icon out of a wig-maker’s dummy and various oddments—a crocodile-skin wallet, a ruler, the mechanism of a pocket watch—and titled it Mechanical Head (The Spirit of Our Age). Two other Berlin artists, George Grosz and John Heartfield, turned a life-size tailor’s dummy into a sculpture by adding a revolver, a doorbell, a knife and fork and a German Army Iron Cross; they gave it a working light bulb for a head, a pair of dentures at the crotch and a lamp stand as an artificial leg.
Duchamp traced the roots of Dada’s farcical spirit back to the fifth-century b.c. Greek satirical playwright Aristophanes, says the Pompidou Center’s Le Bon. A more immediate source, however, was the absurdist French playwright Alfred Jarry, whose 1895 farce Ubu Roi (King Ubu) introduced “’Pataphysics”—“the science of imaginary solutions.” It was the kind of science that Dada applauded. Erik Satie, an avant-garde composer who collaborated with Picasso on stage productions and took part in Dada soirees, claimed that his sound collages—an orchestral suite with passages for piano and siren, for example—were “dominated by scientific thought.”
Duchamp probably had the most success turning the tools of science into art. Born near Rouen in 1887, he had grown up in a bourgeois family that encouraged art—two older brothers and his younger sister also became artists. His early paintings were influenced by Manet, Matisse and Picasso, but his Nude Descending a Staircase no. 2 (1912)—inspired by early stop-action photographic studies of motion—was entirely his own. In the painting, the female nude figure seems to take on the anatomy of a machine.
Rejected by the jury for the Salon des Independants of 1912 in Paris, the painting created a sensation in America when it was exhibited in New York City at the 1913 Armory Show (the country’s first large-scale international exposition of modern art). Cartoon parodies of the work appeared in local papers, and one critic mocked it as “an explosion in a shingle factory.” The Nude was snapped up (for $240) by a collector, as were three other Duchamps. Two years after the show, Duchamp and Picabia, whose paintings had also sold at the Armory Show, traded Paris for Manhattan. Duchamp filled his studio on West 67th Street with store-bought objects that he called “readymades”—a snow shovel, a hatrack, a metal dog comb. Explaining his selections some years later, he said: “You have to approach something with an indifference, as if you had no aesthetic emotion. The choice of readymades is always based on visual indifference and, at the same time, on the total absence of good or bad taste.” Duchamp didn’t exhibit his readymades at first, but he saw in them yet another way to undermine conventional ideas about art.
In 1917, he bought a porcelain urinal at a Fifth Avenue plumbing supply shop, titled it Fountain, signed it R. Mutt and submitted it to a Society of Independent Artists exhibition in New York City. Some of the show’s organizers were aghast (“the poor fellows couldn’t sleep for three days,” Duchamp later recalled), and the piece was rejected. Duchamp resigned as chairman of the exhibition committee in support of Mutt and published a defense of the work. The ensuing publicity helped make Fountain one of Dada’s most notorious symbols, along with the print of Leonardo da Vinci’s Mona Lisa the following year, to which Duchamp had added a penciled mustache and goatee.
Parodying the scientific method, Duchamp made voluminous notes, diagrams and studies for his most enigmatic work, The Bride Stripped Bare by Her Bachelors, Even (or The Large Glass)—a nine-foot-tall assemblage of metal foil, wires, oil, varnish and dust, sandwiched between glass panels. Art historian Michael Taylor describes the work as “a complex allegory of frustrated desire in which the nine uniformed bachelors in the lower panel are perpetually thwarted from copulating with the wasplike, biomechanical bride above.”
Duchamp’s irreverence toward science was shared by two of his New York companions, Picabia and a young American photographer, Man Ray. Picabia could draw with the precision of a commercial artist, making his nonsensical diagrams seem particularly convincing. While Duchamp built machines with spinning disks that created surprising spiral patterns, Picabia covered canvases with disorienting stripes and concentric circles—an early form of optical experimentation in modern painting. Man Ray, whose photographs documented Duchamp’s optical machines, put his own stamp on photography by manipulating images in the darkroom to create illusions on film.
After the war ended in 1918, Dada disturbed the peace in Berlin, Cologne, Hanover and Paris. In Berlin, artist Hannah Höch gave an ironic domestic touch to Dada with collages that incorporated sewing patterns, cut-up photographs taken from fashion magazines and images of a German military and industrial society in ruins.
In Cologne, in 1920, German artist Max Ernst and a band of local dadas, excluded from a museum exhibition, organized their own—“Dada Early Spring”—in the courtyard of a pub. Out past the men’s room, a girl wearing a “communion dress recited lewd poetry, thus assaulting both the sanctity of high art and of religion,” art historian Sabine Kriebel notes in the current exhibition’s catalog. In the courtyard, “viewers were encouraged to destroy an Ernst sculpture, to which he had attached a hatchet.” The Cologne police shut down the show, charging the artists with obscenity for a display of nudity. But the charge was dropped when the obscenity turned out to be a print of a 1504 engraving by Albrecht Dürer titled Adam and Eve, which Ernst had incorporated into one of his sculptures.
In Hanover, artist Kurt Schwitters began making art out of the detritus of postwar Germany. “Out of parsimony I took whatever I found to do this,” he wrote of the trash he picked up off the streets and turned into collages and sculptural assemblages. “One can even shout with refuse, and this is what I did, nailing and gluing it together.” Born the same year as Duchamp—1887—Schwitters had trained as a traditional painter and spent the war years as a mechanical draftsman in a local ironworks. At the war’s end, however, he discovered the Dadaist movement, though he rejected the name Dada and came up with his own, Merz, a word that he cut out of an advertising poster for Hanover’s Kommerz-und Privatbank (a commercial bank) and glued into a collage. As the National Gallery’s Dickerman points out, the word invoked not only money but also the German word for pain, Schmerz, and the French word for excrement, merde. “A little money, a little pain, a little sh-t,” she says, “are the essence of Schwitters’ art.” The free-form construction built out of found objects and geometric forms that the artist called the Merzbau began as a couple of three-dimensional collages, or assemblages, and grew until his house had become a construction site of columns, niches and grottoes. In time, the sculpture actually broke through the building’s roof and outer walls; he was still working on it when he was forced to flee Germany by the Nazis’ rise to power. In the end, the work was destroyed by Allied bombers during World War II.
Dada’s last hurrah was sounded in Paris in the early 1920s, when Tzara, Ernst, Duchamp and other Dada pioneers took part in a series of exhibitions of provocative art, nude performances, rowdy stage productions and incomprehensible manifestoes. But the movement was falling apart. The French critic and poet André Breton issued his own Dada manifestoes, but fell to feuding with Tzara, as Picabia, fed up with all the infighting, fled the scene. By the early 1920s Breton was already hatching the next great avant-garde idea, Surrealism. “Dada,” he gloated, “very fortunately, is no longer an issue and its funeral, about May 1921, caused no rioting.”
But Dada, which wasn’t quite dead yet, would soon leap from the grave. Arp’s abstractions, Schwitters’ constructions, Picabia’s targets and stripes and Duchamp’s readymades were soon turning up in the work of major 20th-century artists and art movements. From Stuart Davis’ abstractions to Andy Warhol’s Pop Art, from Jasper Johns’ targets and flags to Robert Rauschenberg’s collages and combines—almost anywhere you look in modern and contemporary art, Dada did it first. Even Breton, who died in 1966, recanted his disdain for Dada. “Fundamentally, since Dada,” he wrote, not long before his death, “we have done nothing.”
Paul TRACHTMAN. « DADA. The Irreverent, Rowdy Revolution Set the Trajectory of 20th-century Art », Smithsonian Magazine, May 2006
http://www.smithsonianmag.com/arts-culture/dada.html

vendredi 16 septembre 2011

Marcel DUCHAMP et l'art des échecs (II)

MAN RAY, photographie de Raoul DE ROUSSY DE SALES et Marcel DUCHAMP jouant aux échecs, Paris, 1924
http://chessgames.com/player/marcel_duchamp.html
http://sites.google.com/site/caroluschess/famous-people/artists/marcel-duchamp

DADAS de Berlin


Wieland HERZFELDE, Eva GROSZ, George GROSZ, Rudolf SCHLICHTER et John HEARTFIELD, Berlin, 1922

Marcel DUCHAMP, Joueurs d'échecs en 1911








MAN RAY. « Les Champs délicieux » (1921-1922)




MAN RAY, Rayographe, épreuve gélatino-argentique, sans titre, 1922, feuillet 1, Les Champs délicieux, 1922, 22.2 X 17.3


MAN RAY, Rayographe, épreuve gélatino-argentique, sans titre, 1922, feuillet 3, Les Champs délicieux, 1922, 22.2 X 17.3


MAN RAY, Rayographe, épreuve gélatino-argentique, sans titre, 1922, feuillet 5, Les Champs délicieux, 1922, 22.2 X 17.3



MAN RAY, Rayographe, épreuve gélatino-argentique, sans titre, 1922, feuillet 6, Les Champs délicieux, 1922, 22.2 X 17.3



MAN RAY, Rayographe, épreuve gélatino-argentique, sans titre, 1922, feuillet 8, Les Champs délicieux, 1922, 22.2 X 17.3








MAN RAY, Rayographe, épreuve gélatino-argentique, sans titre, 1922, feuillet 9, Les Champs délicieux, 1922, 22.2 X 17.3



MAN RAY, Rayographe, épreuve gélatino-argentique, sans titre, 1922, feuillet 4, Les Champs délicieux, 1922, 22.2 X 17.3


MAN RAY. Rayographe, épreuve gélatino-argentique, sans titre (Coupe, ampoule, pipe et forme circulaire métallique), 1922, feuillet 10, Les Champs delicieux, 22.2 X 17.5

MAN RAY. Rayographies






PHOTOGRAMME

Selon ses domaines d'application, le terme "photogramme" désigne des images de nature différente. En technique cinématographique, il signifie la plus petite unité de prise de vue, l'image indivisible dont la succession, vingt-quatre fois par seconde, crée la continuité filmique. Le mot "photogramme" est aussi employé dans l'acception de "photographie", mais il s'applique alors, spécifiquement, au produit fini (l'image) et non au procédé technique permettant de l'obtenir. C'est en ce sens qu'il faut lire le titre de la célèbre revue britannique Photograms of the Year . Par ailleurs, le mot est utilisé en photographie scientifique pour dénommer un cliché résultant d'une expérience ou d'une observation pointue. Einstein parle ainsi d'un "photogramme de globules rouges". Cet usage scientifique du terme amènera le peintre constructiviste Moholy-Nagy à récupérer le mot, en 1921, pour désigner les images qu'il obtient en chambre noire - c'est-à-dire en laboratoire - sans appareil photographique ni objectif. Selon Moholy, il faut entendre par photogramme une image née de la simple exposition à la lumière d'objets divers posés directement sur le papier sensible. C'est cette définition qui est couramment retenue aujourd'hui.
Si elle doit son nom à Moholy-Nagy, la technique du photogramme n'en a pas moins été pressentie, bien longtemps avant la découverte de la photographie elle-même, par Thomas Wedgwood et Humphrey Davy, qui publient, en 1802, une Méthode pour copier des peintures sur verre et faire des profils par l'action de la lumière sur le nitrate d'argent . Cette application originale des propriétés chimiques de la lumière peut être considérée comme une préfiguration du photogramme. À partir de 1853, Corot et les peintres de Barbizon dessinent à la pointe sur une plaque de verre fumé ou verni qu'ils utilisent comme négatif pour impressionner par contact un papier sensible. Mais cette pratique, qu'ils appellent le "cliché-verre", est encore proche des méthodes picturales. Deux des inventeurs de la photographie, William Henry Fox Talbot en Angleterre et Hippolyte Bayard en France, "copient" des végétaux en les déposant directement sur le papier sensible. Aussi simples soient-elles, ces reproductions doivent pourtant être considérées comme d'authentiques photogrammes.
Les trois artistes qui explorèrent le plus systématiquement les potentialités créatives du photogramme sont Christian Schad, Man Ray et László Moholy-Nagy. En 1918, le peintre d'origine allemande Christian Schad, installé à Zurich où il fréquente les premiers cercles dadaïstes, entrevoit les possibilités de la photographie sans caméra. Il dépose sur la feuille sensible des papiers découpés, non plus pour les copier servilement, mais afin d'en tirer des images neuves. Aux yeux des dadaïstes, ces images ont plus d'une séduction, ne se confondant ni avec la peinture, puisqu'elles sont obtenues automatiquement, ni avec la photographie, puisqu'elles sont affranchies de la réalité; l'effet créé est en grande partie aléatoire et surtout absolument nouveau. Ces qualités suffisent pour plaire à Tristan Tzara, qui les appelle, en jouant sur les mots, des "shadographies" (de l'anglais shadow , ombre), et qui signera le texte accompagnant leur première publication dans le numéro 7 de Dada (1918).
Trois ans plus tard, Man Ray redécouvre le procédé par hasard en essayant de développer un papier qu'il avait oublié d'impressionner. Constatant son erreur, il abandonne la feuille dans le bain de révélateur où se trouvaient également une éprouvette et un thermomètre, et allume la lumière. Aussitôt, une image se forme, qui est à la fois l'ombre projetée des objets sur le papier et leur trace déformée, à cause de la réfraction de la lumière à travers le verre transparent. Au contraire de Schad, Man Ray se sert de vrais objets et non de papiers découpés, ce qui engendre dans ses images un effet tridimensionnel et met en œuvre toute la gamme des tons, du noir profond au blanc éclatant. Les objets ne perdent pas leur identité dans l'opération. Ils sont seulement sublimés en une réalité nouvelle, née du hasard, de l'automatisme du procédé et, bien sûr, des fantasmes de Man Ray: autrement dit, ils acquièrent une surréalité. En décembre 1922, Man Ray publie Les Champs délicieux qui comprend douze "rayographies", selon sa propre expression, avec une préface de Tristan Tzara, et dont le titre évoque Les Champs magnétiques de Breton et Soupault.
László Moholy-Nagy prétend avoir ignoré les travaux de Schad et de Man Ray quand il réalisa ses premiers photogrammes en 1921. Au début, il imite les collages de son ami Kurt Schwitters (qui créera à son tour des photogrammes à partir de 1929) et réalise des images abstraites obtenues par la juxtaposition sur le papier sensible de bandes de papier ou d'étoffes de diverses textures. Au contraire de Man Ray, Moholy transforme toujours les objets en formes non figuratives. Puisque ceux-ci ont peu de points de contact avec le papier, la lumière peut être diffusée par-dessous et brouiller les ombres portées. En utilisant deux ou plusieurs sources d'éclairage, éventuellement même des lampes mobiles, Moholy s'assure que le dessin de l'objet disparaît totalement au profit d'une structuration de l'espace par la lumière. On retrouve dans cette pratique le postulat de base de Moholy, celui qui est à l'origine de sa fameuse sculpture cinétique, le Raum-Licht-Modulator (Modulateur espace-lumière): l'espace existe a priori mais n'est pas visible. C'est la lumière qui le structure en le balisant petit à petit sur le plan de l'image.
Durant les années 1920 et 1930, de nombreux artistes expérimenteront le photogramme. Parmi ceux-ci, Raoul Hausmann, El Lissitzky, Jan Tschichold, Francis Bruguière, György Kepes, Theodore Roszak, Raoul Ubac et Maurice Tabard sont les plus connus. Dans les années 1950, le photogramme connut un regain d'intérêt auprès des adeptes de la Subjektive Fotografie rassemblés autour d'Otto Steinert et Heinz Hajek-Halke. Le flambeau fut repris par Luigi Veronesi, Jean-Pierre Sudre, János Gulyás, Dieter Roth, Dóra Maner et Floris M. Neusüss. On doit à ce photographe, lui-même créateur de photogrammes, d'avoir organisé à Kassel, en 1983, la première exposition rétrospective de photogrammes, dont le catalogue constitue une importante source d'informations que complète son recueil d'articles, intitulé Das Fotogramm in der Kunst des 20. Jahrhunderts (1990).
http://serge.teskrat.pagesperso-orange.fr/fac/termino.htm






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The Photogram- a History “Captured Shadows”
Les RUDNICK.“The shadows that things make The things that shadows make”
© 2004-2006 Les Rudnick

What kind of shape does the absence of light have? Photograms after 1900: Photogram images prior to the avant-garde period between WWI and WWII can, in general, be considered traces, or documents of existing shape or form. There are, of course, exceptions, but after WWI, the experiments of Christian Schad, followed by Man Ray and László Moholy-Nagy essentially changed the photogram from a process for documentation to one of creative expression. [Adolfo Martinez in PhotoVision 22, a quarterly publication, 1981, Arte y Proyectos Editoriales, S. L., p4]. See also Experimental Vision, The Evolution of the Photogram since 1919, by Floris M. Neususs, Thomas Barrow and Charles Hagen, 1994 Denver Art Museum]. The application of the concept of the photogram has its roots in the primordial moments of the history of chemical-based photography. During the early 19th century, as iron and silver based photographic processes were being tried, images were made by placing botanical specimens and delicate objects such as lace onto the chemically coated paper and exposing using sunlight. This was done as an alternative to drawing. Although, there is clearly artistic beauty in the arrangements of these objects in even the earliest photograms, it was not until the early 20th century that artists and photographers began to express new ideas via the photogram. In 1918 Christian Schad (1894-1962) (German), who was inspired by cubism, began experimenting in Europe by making cameraless photographic images. Talbot had originally called these images “photogenic drawings” which were prints made by placing objects onto photosensitive paper and then exposing the paper to sunlight. By 1919 Schad was creating photogenic drawings from random arrangements of discarded objects he had collected such as torn tickets, receipts and rags [Naomi Rosenblum, A World History of Photography, 3rd edition 1997, Abbeville Press, p393]. Schad's new imagery was constructed by taking discarded unimportant objects and arranging them. The photograms created from these arrangements had taken on a new form and meaning not considered previously. These prints were published in 1920 in the magazine Dadaphone by Tristan Tzara. She referred to these as “Schadographs”. It was Tristan Tzara who called these images Schadographs to express a Dadist desire to create art from discarded objects. Schad's descriptions of his techniques were eventually used by both Man Ray and Lazlo Moholy-Nagy in their more extensive explorations.[The J. Paul Getty museum handbook of the photographs collection/ Weston Naef, 1995]. Man Ray (1890-1976) was born Emanuel Rudnitsky in Philadelphia. He became famous because of his photogram imagery. His early influences in New York included attending the National Academy of Design and going to lectures at the avant garde Ferrer Social Center. During his formative years he was fortunate to have met Alfred Steiglitz, and later Marcel Duchamp, and Francis Picabia. Man Ray, became a colleague of Marcel Duchamp and Francis Picabia during the New York Dada period. In 1922 he experimented with producing images using only light and photographic paper. He called these images Rayographs, combining his name and the source of light and being similar to Andre Breton's "automatic writing

He produced these Rayographs by arranging transleucent and opaque objects on photosensitive materials. His techniques included immersing the object in the developer during exposure, and using stationary and moving light sources. [Naomi Rosenblum, A World History of Photography, 3rd edition 1997, Abbeville Press, p394]. Man Ray obviously did not invent the photogram, but he breathed life into the technique and gave it a spirit. He moved to Paris in 1921 where he did professional portraits and fashion photography. It was during this time that Man Ray explored many creative aspects of the photogram. László Moholy-Nagy (1895-1946), American, born in Austria-Hungary (in Bacsborsod). He moved to Vienna in 1919 after serving in the army. He later moved to Berlin, creating metal sculptures and paintings. In 1919 he and his wife Lucia Moholy began experimenting with the process of making photograms, and Lucia Moholy (Czechoslovakia) developed a technique they called the photogram, which is the term generally used today. This term was used as a direct comparison with the rapid direct communication of the telegram. http://anniehalliday.com/photograms.php . Moholy-Nagy considered the “mysteries” of the light effects and the analysis of space as experienced through the photogram to be important principles that he experimentally explored and advanced in his teaching throughout his life. [László Moholy-Nagy, Vision in Motion (1947)]. Moholy-Nagy, Gyorgy Kepes and Nathan Lerner design a traveling exhibition in 1941 of photograms created by students and faculty of the school called "How to Make a Photogram." This exhibit travelled through the winter of 1947. [Taken By Design, p148]. Moholy-Nagy used many unconventional methods to create effects in his photograms that noone had previously considered or demonstrated effectively. For example, he is reported to have squirted oil into developer and squeezed oil between sheets of glass during exposure to the photosesnsitive emulsion.

Moholy continued throughout his life to explore the possibilities of light. Moholy had claimed that he discovered the photogram without knowing of the work of Christian Schad or Man Ray. Early letters from Moholy and others concerning the discovery of the photogram have been published [Andreas Haus, "Laszlo Moholy-Nagy, Photographs and Photograms," Pantheon Books, 1980, translation from the German by Frederick Sanson pp 51-52]. Moholy-Nagy is considered a major influence on the history of photography. He trained photographers in the use of light. Whether or not he discovered or rediscovered the photogram process he certainly created via manipulation of light and object, memorable images based on the synergy of this combination. I suggest that generally Moholy-Nagy photograms can be distinguished from those of Man Ray in that Moholy’s photograms are more about light while those of Man Ray are more about the object employed in the process or in a sense of something real or a metaphor for something real. Moholy’s luminograms are completely about light and design. Timeline:The practitioners of photogram art during each recent decade are as follows: 1920-1930sHerbert Bayer (1900-1985) - was an Austrian-American graphic artist, architect and painter. He was born in Haag am Hausruch, Austria and died in 1985, Santa Barbara, California. Christian Schad (1894-1962) - Man Ray (1890-1976) - began making photograms in 1922 in Paris which he called Rayographs. László Maholy-Nagy (1895-1946)- worked with both staff and students at the Institute of Design (originally called the New Bauhaus) in Chicago, Moholy-Nagy and these other artists created a large body of photograms, luminograms and other cameraless images. many of his images were luminograms, whereby the image was created by moving the light source - in essence a way of painting with light to reveal the penetration of light through planes of the object intersecting the path of light. Eli Lissitzky (1890-1941) – born Elizar Morduchivitch Lissitzky, Russian, was one of the first to apply the photogram technique in advertizing art. In 1924 Lissitzky designed a poster for Pelikan inks. 1930-40sLotte Johanna Alexandra Jacobi (1896-1990) was born in Prussia and lived in Berlin from 1925-1935. She left Germany and emigrated to the United States to flee Nazi Germany. She lived in New York City for two decades and then lived in New Hampshire until her death. She is very well known for her portraits and created a variety of photogram and luminogram images. Carlotta Corpron (1901-1988) was born in Blue Earth, Minnesota. She spent her formative years in India at an English boarding school and returned to Michigan State Normal School (now Eastern Michigan University). After her B.S. degree in art education she studied art education and fabric design at Teacher's College of Columbia University obtaining her M.A in 1926. [The Handbook of Texas Online, s.v. "Corpron, Carlotta"' http://www.tsha.utexas.edu/handbook/online/articles/CC/fcoda.html]. Corpron became a teacher at Texas Woman's University in 1935 and in 1942 she led a light workshop for Lazlo Moholy-Nagy. Just two years later, Gyorky Kepes went to Texas Woman's University to write a book and his interest in her work encouraged her to produce several series of abstract images that would become some of the most notable of her career. Her "Light Patterns" and later "Light Follows Form" series employed light to create patterns on three-dimensional objects. Raoul Hausmann (1886-1971) was born in Austria and was a writer and sculptor. Hausmann was a cofounder of the Berlin Dada movement in 1917, just prior to the end of WWI. He also created photomontage. In 1923, Hausmann stopped painting in favor of exploring several experimental photographic techniques, including the photogram. Gyorky Kepes (1906 - 2001) -Hungarian - born in Selyp, Hungary and educated at the Budapest Royal Academy of Fine Arts. After completing his degree he joined the studio of Laszlo Moholy-Nagy and from 1930 until 1936 he worked with Moholy-Nagy. Through Moholy-Nagy he was able to meet Walter Gropius. He was later invited to run the Color and Light Department at the New Bauhaus and then later the Institute of Design in Chicago, Illinois, where he taught until 1943. From 1946 until 1974 he taught at the Massachusetts Institute of Technology and during that time (1964) he created the Center for Advanced Studies at MIT where he was the director until 1974. Kurt Schwitters (1887-1948) - German - born in Hanover, Germany, he was a student of the Dresden Academy of Art. Schwitters was a painter who worked in Dada, Constructivist and Surrealist genres. He was a master of the collage. Early in his career he called one of his collages the Merz picture. Afterwards he referred to all of his work as Merz. Forced to leave Germany during the years leading up to WWII, he left Germany for Norway in 1937. By 1940 Germany had invaded Norway and he was again forced to flee to England where he was interned. He lived in london until 1945 and then moved to Ambleside (English Lake District) where he was able to create new work due to funds provided by the Museum of Modern Art in New York. Alexander Rodchenko (Aleksandr Mikhailovich Rodchenko) (1891-1956) Russian - born in St. Petersburg, Russia. He studied at the Kazan School of Art and at the Stroganov Institute in Moskow. An avant-garde artist, began taking photographs in 1924. He worked first as both a painter and graphic designer. Later he began to use photography and photomontage to communicate his social concepts in a way he could express better through photographic methods. He was influenced by the photomontage of the German Dadaists and began to use these techniques as early as 1923. Jaromir Funke – (1896-1945) Czech Curtis Moffat – English – assistant to Man Ray
http://www.photograms.org/chapter03.html

MAN RAY. « L'Énigme d'Isidore Ducasse »


MAN RAY. L'Énigme d'Isidore Ducasse, objet et photographie, 1920


http://soleildanslatete.centerblog.net/rub-lautreamont-.html





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« BEAU COMME ... »



« Avec quelle satisfaction de n'être pas tout à fait ignorant sur les secrets de son double organisme, et quelle avidité d'en savoir davantage, je le contemplais dans sa métamorphose durable ! Quoiqu'il ne possédât pas un visage humain, il me paraissait beau comme les deux longs filaments tentaculiformes d'un insecte ; ou plutôt, comme une inhumation précipitée ; ou encore, comme la loi de la reconstitution des organes mutilés ; et surtout, comme un liquide éminemment putrescible ! Mais, ne prêtant aucune attention à ce qui se passait aux alentours, l'étranger regardait toujours devant lui, avec sa tête de pélican ! Un autre jour, je reprendrai la fin de cette histoire. » (Les Chants de Maldoror - Chant V)



« le grand-duc de Virginie, beau comme un mémoire sur la courbe que décrit un chien en courant après son maître, s'enfonça dans les crevasses d'un couvent en ruines. » (Les Chants de Maldoror - Chant V)



« le vautour des agneaux, beau comme la loi de l'arrêt de développement de la poitrine chez les adultes dont la propension à la croissance n'est pas en rapport avec la quantité de molécules que leur organisme s'assimile, se perdit dans les hautes couches de l'atmosphère. » (Les Chants de Maldoror - Chant V)



« le scarabée, beau comme le tremblement des mains dans l'alcoolisme, disparaissait à l'horizon. » (Les Chants de Maldoror - Chant V)



« beau comme la rétractilité des serres des oiseaux rapaces ; ou encore, comme l'incertitude des mouvements musculaires dans les plaies des parties molles de la région cervicale postérieure ; ou plutôt, comme ce piége à rats perpétuel, toujours retendu par l'animal pris, qui peut prendre seul des rongeurs indéfiniment, et fonctionner même caché sous la paille ; et surtout, comme la rencontre fortuite sur une table de dissection d'une machine à coudre et d'un parapluie ! (Les Chants de Maldoror - Chant VI)


« Beau comme le vice de conformation congénital des organes sexuels de l'homme, consistant dans la brièveté relative du canal de l'urètre et la division ou l'absence de sa paroi inférieure, de telle sorte que ce canal s'ouvre à une distance variable du gland et au-dessous du pénis ; ou encore, comme la caroncule charnue, de forme conique, sillonnée par des rides transversales assez profondes, qui s'élève sur la base du bec supérieur du dindon ; ou plutôt, comme la vérité qui suit : "le système des gammes, des modes et de leur enchaînement harmonique ne repose pas sur des lois naturelles invariables, mais il est, au contraire, la conséquence de principes esthétiques qui ont varié avec le développement progressif de l'humanité, et qui varieront encore ; " et surtout, comme une corvette cuirassée à tourelles ! Oui, je maintiens l'exactitude de mon assertion. » (Les Chants de Maldoror - Chant VI)

mardi 13 septembre 2011

MAN RAY. « Le Violon d'Ingres », 1924


MAN RAY, Le Violon d'Ingres, Épreuve aux sels d’argent rehaussée de crayon et encre de Chine , 28,2 X 22,5, Paris, Musée national d'art moderne

http://imagesanalyses.univ-paris1.fr/violon-ingres-36.html



Le Dadaïsme avait accompli ce qu’il s’était proposé de faire : il s’était moqué des futilités artistiques et politiques de l’époque, leur avait opposé sa propre irrationalité, et avait renversé toutes les valeurs établies. C’était comme si les Dadaïstes se proposaient de prendre entre leurs mains les affaires de ce monde, ce qui laissait supposer qu’ils n’auraient pas pu faire un plus grand gâchis que les dirigeants accrédités. (…) Le Dadaïsme ne mourut pas : simplement, il se transforma.
Man RAY, Autoportrait, Paris, Robert Laffont, 1964
http://raforum.apinc.org/article.php3?id_article=2443#nb18

samedi 10 septembre 2011

MARCEL DUCHAMP et l'art des échecs (I)


Marcel Duchamp and Eve Babitz playing chess during the Duchamp retrospective at the Pasadena Museum of Art in 1963. The photograph by Julian Wasser is reprinted in numerous places, including West Coast Duchamp, Bonnie Clearwater, ed., Grassfield Press, Miami Beach, 1991, p. 75, fig. 34; additi onal photographs of the scene, including a page of Wasser's contact sheets, are on p. 73, fig. 33 and p. 75, fig. 35. Dickran Tashjian discusses the circumstances of taking the photograph on pp. 71-74 of his article "Nothing Left to Chance: Duchamp's First Retrospective," pp. 61-83 in Clearwater. Duchamp is shown with this photograph in Ugo Mulas, New York: The New Art Scene, Holt, Reinhardt, Winston, 1967, p. 74 and studying it on the endpapers of Sur Marcel Duchamp, Calvesi, Izzo, Menna, et al., Fremart Studio, Naples, 1975. Eve Babitz was twenty years old when the photograph was taken. Unlike the also faceless subject/object of Étant Donnés, and perhaps casting a strange sort of multiply refracted light on that work, Babitz has a voice. She went on to design album covers (Buffalo Springfield Again, Atlantic Records, 1967), write novels (Slow DaysFast Company: the World, the Flesh, and L.A., Alfred A. Knopf, 1977, Sex and Rage: Advice to Young Ladies Eager to Have a Good Time, A Novel, Alfred A. Knopf, 1979, L. A. Woman, Simon and Schuster, 1982), write stories (Black Swans, Alfred A. Knopf, 1993), and write essays (Eve's Hollywood, Delacorte, New York, 1974, Two by Two: Tango, Two-Step and the L.A. Night, Simon and Schuster, 1999, and various magazine articles). She gives her account of the photographic session in "I was a Naked Pawn for Art : Being a True Account of the Day Marcel Duchamp Put the West Coast Underground on the Culture Map by Playing Chess in Pasadena with the Author, Who Was at the Moment an Unclothed Young Woman with a Lot to Learn," Esquire, Vol. 116, No. 3 (September 1991), pp. 164-74. A much shorter version, with some additional photographs, "Marcel Prefers Nudes," appears in Craig Krull, Photographing the L. A. Art Scene 1955-1975, Smart Art Press, Santa Monica, 1996, pp. 40-45.

Steven B. GERRARD. « A Pun Among Friends »

by http://www.toutfait.com/issues/issue_3/Notes/gerrard/gerrard.html

 

The photograph of Marcel Duchamp playing chess with a nude Eve Babitz has become one of most iconic images of the French artist. In a gallery filled with his works, a well-dressed, gentle-looking Marcel sits opposite a young, voluptuous woman. Her face retreats behind her bangs but her posture is composed and comfortable, and Duchamp himself does not seem to care that his opponent has no clothes on. Behind them is “The Large Glass," or “The Bride Stripped Bare by her Bachelors, Even,” and a number of other significant pieces that fade into the background. The nude and the elderly artist beg to be viewed as another piece of art in the gallery; the viewer remains bewildered and indecisive, however, about how to approach the photo as a whole. It was the perfect portrait of Duchamp and Los Angeles.

According to Babitz’s 1991 Esquire essay “I was a Naked Pawn for Art,” her photo-op with Duchamp was actually more of a capricious, attention-seeking young-adult stunt than an artistic statement. Here's what happened: A massive retrospective exhibition of Duchamp’s art was held at the Pasadena Art Museum in 1963. Everyone important was invited to a private viewing, yet Babitz, though she was friends with curator Walter Hopp, was not. Later, at the public viewing, Time photographer Julian Wasser, her younger sister’s date to the private viewing, suggested it would be a fun idea for Babitz to pose naked playing chess with Duchamp. Young, reckless and dying to get revenge on Hopp for his earlier snub, the twenty-year-old Babitz jumped at the opportunity.

The next morning, Wasser photographed Babitz playing chess with a very old, very polite and very un-L.A. Duchamp. The shoot itself lived up to neither its hype nor its legacy. Wasser spent ages fixing the lights and Babitz arrived at the gallery dressed in “nunlike severity.” She tried not to think about her stomach, which was puffed up due to the birth control pills she was taking, ran to get dressed soon as Wasser finished the shoot, and succeeded in confronting Hopp. That was all.

Wasser was already driving around Hollywood with a police radio in his car in 1963, and he went on to become one of the most successful celebrity photographers of the 20th Century. Babitz became an acclaimed writer who published books and novels about L.A. culture, but she is now more than anything remembered as the naked woman who played chess with Duchamp.

Today, Babitz’s literary reputation is borderline nonexistent: all her books are out of print and difficult to find even at libraries. Of the three books Stanford holds, one is held in a non-circulating collection on Californian history, and the other two are buried in “SAL3,” the Stanford Auxiliary Library. A Google search of “Eve Babitz” yields a slew of reproductions and humorous (and awkward) parodies of Wasser’s photo, a few obscure graduate dissertations, blog posts by serious bookaholics, as well as the Myspace page of an British indie goth-pop band called “All About Eve Babitz.” She doesn’t even have a Wikipedia page.

However, once upon a time she was the epicenter of everything Los Angeles. She was neither a celebrity nor a wealthy heiress, but it seemed as if everyone who was anyone was somehow magically connected to Eve Babitz. Besides being friends with the aforementioned Walter Hopp, the legendary curator whose gallery hosted the first solo show by Andy Warhol, she was the daughter of an L.A. Philharmonic violinist, and eventually became the goddaughter of a certain visiting musician named Igor Stravinsky. She was one of Ed Ruscha’s “Five girlfriends of 1965” and she also unapologetically slept with Jim Morrison. And through the sheer serendipity of her meeting her sister's date, the media-savvy, impulsive Julian Wasser, Babitz finally and for posterity became the nude girl who played chess with Duchamp.

Ironically, the world of Eve Babitz’s writing could not be further from European manners and intellectual French Modernism, and deserves recognition in its own right. It would be a slight stretch to admit her into the canon of great 20th century American writers, but her work definitely packs more punch than that of many writers with Wikipedia pages. Her essays and novels present a city populated by alcoholics, fame whores and Scientologists, a glamorous Sodom without a sense of history and an enforced moral code, whose only oases of any form of purity were vegan, natural food stores decorated in Indian wallpaper and frequented by yoga jocks and sex addicts. These were atheist and political people who worshiped Frank Sinatra and Elizabeth Taylor and believed that “fascism is worse than what Oedipus did to his mother.” L.A. was admittedly messy, weird and sinfully delicious; Babitz was not afraid to love every bit of it.

Certainly, versions of Babitz’s L.A. can be found in works of a dozen other writers, but unlike Joan Didion or Nathaniel West, Babitz does not attempt to critique L.A. She acknowledges that “what educated people from the East Coast and England take one look at [LA] and think is what is wrong with this place,” but she has no desire to fix it. Writing in a style that is a mix of David Sedaris and Lauren Conrad or Chelsea Handler, she is observant, witty, tactful, efficient and daring. After reading Tolstoy, Austen, Dickens and Camus, she concluded that “the point of these book as far as I, a bleached blond teenager growing up in Hollywood, was concerned was that though the authors thought they were so smart--being from England and the East Coast and so well educated and everything--they were suckers for trashy cute girls who looked like goddesses and just wanted to have fun.”

Occasionally she dives into intricate, poetic descriptions or introspective streams of consciousness, but for the most part she is the immensely biting and practical writer who chose to attend L.A. Community College “because you could park, unlike at UCLA.” To Babitz, a flat stomach is worth more than the “tenets of Western Civilization that try to convince us there are higher things,” which “always seemed to [her] just a handful of dust.” The towering necessity of a svelte figure over higher philosophy is thoroughly and nakedly explored in many of her essays, and she does not care if the reader disagrees. Perhaps her biggest flaw is that she succeeded so beautifully in writing records of a disposable culture that her writings became a part of it, and were themselves forgotten as the world she describes vanished and was replaced

Lucy LI. « Beyond Nude Chess: Eve Babitz Embodied Bygone L.A. »

http://www.marcelduchamp.net/news.php?id=626

http://www.toutfait.com/newsfulllist.php?id=626


La peinture ne doit pas être exclusivement visuelle ou rétinienne. Elle doit intéresser aussi la matière grise, notre appétit de compréhension. Il en est ainsi de tout ce que j'aime : je n'ai jamais voulu me limiter à un cercle étroit et j'ai toujours essayé d'être aussi universel que possible. C'est pourquoi par exemple, je me suis mis à jouer aux échecs. En soi, le jeu d'échecs est un passe-temps, un jeu, quoi, auquel tout le monde peut jouer. Mais je l'ai pris très au sérieux et je m'y suis complu parce que j'ai trouvé des points de ressemblance entre la peinture et les échecs. En fait, quand vous faites une partie d'échecs, c'est comme si vous esquissiez quelque chose, ou comme si vous construisiez la mécanique qui vous fera gagner ou perdre. Le côté compétition de l'affaire n'a aucune importance, mais le jeu lui-même est très, très plastique et c'est probablement ce qui m'a attiré.